La séparation définitive avec un être cher est une épreuve bouleversante, un chaos intérieur, un tsunami... De nombreux auteurs comme Elisabeth Kübler-Ross, Michel Hanus, Christophe Fauré ou Jean Monbourquette, ont défini les étapes du deuil. Le nombre de ces étapes diffère selon les auteurs, mais elles peuvent être regroupées en trois grandes phases qui, quelle que soit la perte, se retrouvent.
Chaque deuil est toutefois particulier car il dépend du lien d’attachement (positif ou négatif) entre la personne disparue et la personne endeuillée, de leur histoire respective, de leur culture, etc.
Ces phases qui jalonnent le deuil sont des réactions normales dont la durée varie selon le vécu des personnes et qui ne sont pas forcément pathologiques. Elles peuvent le devenir si une personne reste figée dans une de ces étapes.
De plus, l’écoute de personnes en deuil montre que le mot « étape » ou « phase » est un concept intellectuel pour nous permettre de comprendre ce qui se passe. En fait, l'endeuillé ne passe pas d’une étape 1 à une étape 2, d’une étape 2 à une étape 3… La personne en deuil, pendant ce processus va, le plus souvent, être dans une errance, une oscillation entre « je vais bien », et « je ne vais pas bien » et cela, parfois, dans la même journée…
C’est la « phase de détresse », la « phase d’impact », la « phase d'hébétude ». Le monde s’est arrêté de tourner, le temps n’existe plus... Il y a une perte de contact avec la réalité. Les personnes se sentent dans un état second, en état de choc. C’est la sidération, on ne peut croire à ce qui vient de se passer. Elle est en effet caractérisée par le déni et l’état de choc.
Le déni : « Non, non, ce n’est pas possible », « Non, non, je ne veux pas ». Cette période est inconstante : elle dure en général quelques heures à quelques jours, exceptionnellement plus d'une semaine. Le sujet n'en conserve que peu de souvenirs.
L'état de choc : le sujet est saisi par la stupéfaction, l'incrédulité qui traduit le déni défensif. Il se trouve brutalement plongé dans un état de torpeur, d'engourdissement, il est comme anesthésié. Pourtant, il continue à vivre et à agir, il fait les démarches nécessaires, mais de façon automatique.
Après le choc et le déni, il y a une phase de recherche puis de « dépression » ou de repli, elle représente la période aiguë du deuil.
C’est une période où l’on cherche à retrouver l’être aimé. C’est une période angoissante, car on a peur de ne plus entendre sa voix, on a peur même de ne plus reconnaître cette voix. On a peur de ne plus reconnaître non plus les traits de son visage, ses mimiques... On se sent dépossédé de l’être aimé. On recherche partout autour de soi les habitudes de l’autre qui habillaient notre vie. C’est une phase où beaucoup de personnes ont l’impression de vivre des signes indirects de la présence de celui qui les a quittés : “je sens sa présence près de moi”, “je crois parfois entendre sa voix”, “je pressens qu’il essaie de me contacter”, “elle est venue me voir en rêve”, “ il me protège, je le sens”...C’est une période de grande vulnérabilité, où les personnes ne sont pas à l’abri de charlatans, qui peuvent imposer leur pouvoir d’influence.
Elle est caractérisée par un état émotionnel intense d'allure dépressive avec : tristesse, pleurs, culpabilité, honte, irritabilité, anorexie, insomnie, sentiment de vide, fatigue. Un sentiment de colère vis-à-vis du mort n'est pas rare. Colère et culpabilité traduisent l'ambivalence de l'endeuillé, qui est pris entre le sentiment de n'avoir pas fait tout ce qui était en son pouvoir à l'égard du décédé et celui d'avoir été injustement abandonné par lui.
Attention : La tristesse d’une séparation n’est pas à confondre avec une dépression, c’est une réaction normale. Cette étape devient pathologique si elle persiste trop longtemps.
C’est une phase de profonde tristesse qui intervient à distance du décès, lorsque la vie de son entourage, si présent au moment du drame, a repris son rythme quotidien, alors que le rythme de la personne endeuillée est toujours au ralenti. “Comment peuvent-ils l’avoir oublié aussi vite ?”, “Ils ne voient donc pas que je suis triste et que je souffre ?”
C’est une étape très difficile, car la souffrance y est très forte, exacerbée par le sentiment que les autres ne comprennent rien à cette détresse. Les émotions y sont très vives et sont en étroites relations avec le vécu.
On constate :
Au cours de cette phase centrale, des perceptions sensorielles d'allure hallucinatoire peuvent survenir (impression d'entendre la voix ou le pas du défunt, de sentir son contact, de l'entrapercevoir, etc.). L'endeuillé est toutefois conscient de leur absence de support réel.
La sidération se manifeste différemment que pendant la période de choc ou de déni…
l’endeuillé reste figé, impuissant, sans réaction. Parfois, il fait les gestes quotidiens mais sera incapable de s'en souvenir…
La difficulté de cette période est celle du diagnostic différentiel entre deuil normal et dépression. Sa durée varie entre plusieurs semaines et un an : elle est inférieure à six mois pour la plupart des sujets.
Il s’agit d’une phase de reconstruction, de récupération, de restitution, de guérison, d'adaptation. Elle est marquée par :
*Souvent les personnes en deuil réfutent ce terme d'« acceptation ». Accepter ne veut pas dire être d’accord mais reconnaître le « principe de réalité » et d’intégration du défunt avec ses qualités et ses défauts. Il est alors moins idéalisé et les émotions sont atténuées…
Cette phase de restructuration est particulièrement importante car elle débouche sur la vie et le « être ensemble ». Le défunt est dans les pensées mais la personne endeuillée est apaisée et peut alors se tourner vers d’autres projets, d’autres relations.
Pour réaliser cette « traversée du deuil », parler de ce que l’on ressent et être écouté est essentiel.
Des mots contre des maux :